Dans la compréhension d’une période de l’humanité, l’art a toujours été son meilleur miroir. Le nôtre, collé à la seconde moitié du XXème siècle, n’échappe pas à ce constat. Témoin de son temps, révélateur de nouvelles ambitions, il résulte des deux guerres mondiales qui ont totalement changé notre vision. Des codes différents s’imposèrent et firent basculer les temps anciens dans l’ère moderne.

À partir des années 1980, j’avais été réceptif à ces orientations et à la grande liberté qui s’en dégageait. Cependant, ayant fait une synthèse du surréalisme, de l’abstraction et de l’art contemporain lors de ma précédente période, je souhaitais provisoirement revenir à mes premiers amours, à savoir une représentation figurative et classique des formes.

Je n’avais pas oublié que j’étais sculpteur. L’approche du corps féminin, idéalisé ou non, était un de mes terrains de prédilection, comme en témoignent nombreuses de mes gravures et peintures. Le corps féminin m’offrait d’extraordinaires possibilités d’interprétation, tant par sa grâce que par la beauté des courbes et de sa plastique. Je comprenais aisément pourquoi, à travers les siècles et les différentes civilisations, autant de sculpteurs anonymes ou célèbres l’avaient mis à l’honneur. L’art grec m’avait impressionné, en particulier les caryatides de l’Érechthéion à l’Acropole d’Athènes.

Pressé d’obtenir une grande variété de figurines, j’optais pour l’argile, plus rapide que l’exécution en bois ou en pierre. Toutes debout, habillées ou non, leurs parures étaient constituées de voiles et de vêtements empruntés à l’Antiquité ou créés par mes soins. Porteuses d’énigmes et de fragilité, tel du cristal, ces sculptures regardaient le spectateur. Compagne de l’homme, la femme y était la vie et l’accord intime avec la nature.

Par le biais du moulage en plâtre, toutes mes korês servirent de modèles. Ces originaux me permirent des variantes ciselées puis installées dans des tableaux-sculptures, des boîtes aux formes variables et dans des structures rappelant la verticale immobile du totem, symbole d’éternité et du souvenir. Dans ma seconde approche, je remplaçais le bas-relief par de nombreuses rondes-bosses en terre cuite de couleur naturelle ou teintée.